‘J’entends des regards que vous croyez muets.’ Un magnifique titre emprunté à Racine dans Britannicus.
‘Caché près de ces lieux, je vous verrai, madame.
Renfermez votre amour dans le fond de votre âme :
Vous n’aurez point pour moi de langages secrets ;
J’entendrai des regards que vous croirez muets ;
Et sa perte sera l’infaillible salaire
D’un geste ou d’un soupir échappé pour lui plaire.
Néron est amoureux de Junie qui, elle, aime Britannicus dont elle est aimée en retour. Dans la scène où ce vers est prononcé, Néron veut obliger Junie à dire à Britannicus qu’elle ne l’aime plus. Si elle lui dit autre chose, par un regard, par un geste, Néron qui la surveille, caché derrière une tenture, le saura et Britannicus périra.
Ici Arnaud Cathrine prend le risque de se raconter à travers la galerie de personnages qu’il vole et invente. Le pacte autobiographique est un jeu de regards et de miroirs ; celui qui observe se dévoile. De même ces 65 textes courts nous sont présentés anonymement et ce n’est qu’à la fin que nous découvrons leurs titres comme un indice vers une nouvelle lecture, un nouveau point de vue. Dans ce 14e livre, l’auteur explore toujours les territoires intérieurs et sentimentaux, sous le verni des conventions sociales, mais ici en se mettant en scène en tant qu’auteur et en tant que sujet. Et c’est bien un bandeau miroir qui s’affiche sur la couverture du livre, tel un clin d’œil.
La beauté du livre tient à l’acuité du regard et du verbe, à sa quête bouleversante de la vérité. « Ce fut épuisant et long de devenir nous-mêmes, mais nous pouvons être fiers d’y avoir consenti. »/ Michel Abescat ( Télérama n°3610)
Arnaud Cathrine nous parle de son livre : https://www.youtube.com/watch?v=daorRybo9o0
Nous avions eu le plaisir de recevoir Arnaud Cathrine à Peynier avec Florent Marché pour la lecture musicale ‘Sous le soleil exactement’ : https://www.peynier.net/2018/04/09/apres-le-soleil/