Le château de Peynier constitue l’élément principal de l’architecture du village. Cet édifice a été bâti au milieu de XVIe siècle par un homme de la famille de seigneurs de Peynier, Guillaume de Matheron.

Plus tard, Louis Isoard de Matheron paraît avoir considérablement réaménagé et fait décorer le château, probablement dans les années 1560. Les travaux sont achevés avant 1590. Il est typique de l’architecture de la Renaissance provençale. 

Deux grandes tours rondes flanquent la façade principale, lesquelles étaient percées à l’époque de fenêtres à croisées. Dans la petite cour, un M formé au sol par des briques au milieu de la calade rappelle le nom de Matheron. Le château passe ensuite à la famille Isoard de Chênerilles puis aux d’Arbaud de Matheron, avant de devenir la propriété des Thomassin de Peynier au milieu du XVIIe siècle.

Un siecle plus tard, le château commence à prendre de l’âge, et il est temps pour lui de faire peau neuve. Au XVIIIe siècle, le marquis Louis de Thomassin de Peynier prend l’initiative de le réaménage entièrement. Il commence par faire réaliser des décors de gypseries dans les salons, fait réaménager les jardins en y ajoutant un magnifique portail monumental en 1769 (date gravée sur le pilier). Pour ce qui est de l’intérieur du château, il a conservé une partie de son escalier monumental (similaire à ceux que l’on trouve dans les hôtels particuliers aixois) et un plafond à la française dans le grand salon, ainsi que des cheminées en marbres.

Durant le mois de mars 1789, le marquis de Peynier se trouve assiégé dans son château. Les habitants sont fous de rage, et exigent qu’il renonce à ses droits seigneuriaux. La famille Thomassin de Peynier décide malgré ça de ne pas émigrer et le château reste leur propriété. Par héritage, le monument passe aux mains des familles de Forbin d’Oppède, puis de Villeneuve de Bargemon. En 1993, la comtesse de Villeneuve de Bargemon décède et le château est cédé à l’archevêché d’Aix-en-Provence. Neuf an plus tard, en 1942, Edmond Barthélemy fait installer une « école permanente de cadres », du mouvement de jeunesse catholique « Cœur vaillants, Âmes Vaillantes ». L’établissement ferme en 1947, et deux ans plus tard, une maison d’enfants est ouverte. Si la structure était en premier lieu un établissement à caractère sanitaire, il prit vite en charge les enfants cardiaques. En 1986, une école privée d’enseignement primaire et secondaire s’installe au château.

L’édifice est racheté définitivement par la commune dans les années 2000 afin de lancer un grand projet de réhabilitation pour y transférer l’Hôtel de Ville et y regrouper l’ensemble des associations communales.

Le château et le marquis de Peynier

Par son histoire, par la place qu’il occupe dans le paysage et par son architecture, le château est incontestablement le monument le plus important de Peynier. Pourtant, il n’est pas d’édifice pour lequel on possède si peu de données historiques. Heureusement, la découverte d’archives inédites à la bibliothèque Méjanes d’Aix a incité à effectuer de nouvelles recherches. Désormais, il est possible non seulement d’écrire l’histoire de sa construction, depuis la Renaissance jusqu’au classicisme du XVIIIe siècle, mais également de suivre celle de ses occupants. On y rencontre des membres du parlement de Provence, un maître d’hôtel à la cour des Valois, un seigneur hôte du philosophe Pierre Gassendi, des officiers de la Marine royale française, un intendant et un gouverneur aux Antilles.

Avant le château, le « Château vieux » féodal

Peynier vers 1590, par A. Vittozzi. Le « Château vieux » est visible à gauche, et les tours du château actuel à droite.

Jusqu’à la fin du Moyen Âge, Peynier est partagé entre plusieurs coseigneurs, qui ont tous une résidence au coeur du village, dans le quartier qui surplombe l’église paroissiale, entre les rues des Remparts, de l’Eglise et de Provence. C’est là que se trouvaient les bâtiments du « Château vieux », forteresse qui dominait autrefois les maison médiévales de Peynier. De ce premier château, il ne reste presque rien. Abandonné par les seigneurs au XVIe siècle, il est en grande partie rasé en 1786 lors de l’agrandissement de l’église Saint-Julien.

Le château de la Renaissance

Fenêtre à demi-croisée (v. 1550-1590), façade nord.

Au XVIe siècle, les Matheron sont les seigneurs majeurs de Peynier. Descendant d’un ami du roi René, ils ont fait édifier une première résidence à l’emplacement du château actuel. En 1557, d’après l’inventaire des biens de Guillaume de Matheron, cette maison seigneuriale possède une cave et une salle basse au rez-de-chaussée, une salle de réception, une chapelle, une cuisine et la chambre du seigneur avec son étude au premier étage, et enfin trois chambres au dernier étage. Plus tard, Louis Isoard de Matheron paraît avoir considérablement réaménagé et fait décorer le château, probablement dans les années 1560. Les travaux sont achevés avant 1590. En effet, à cette date, l’architecte italien Ascanio Vittozzi réalise une esquisse du village, sur laquelle on distingue bien le château dans ses volumes actuels. Louis Isoard de Matheron fait édifier une façade encadrée de deux majestueuses tours selon le goût de la Renaissance provençale. Les façades sont percées de fenêtres à meneaux ou à demicroisée, avec traverses à section carrée moulurées. Dans le jardin se trouve un puits à margelle carrée. Devant la porte principale, une calade arbore le M des Matheron. C’est sans doute au XVIIe siècle que l’escalier d’honneur est aménagé à l’intérieur, avec son arc triomphal en anse de panier, à la manière des hôtels particuliers aixois.

Les décors classiques (v. 1730-1740)

Vue aérienne des vestiges du jardin à la française dans les années 1950.

La seconde grande campagne de travaux a lieu à partir de 1732, sur commande du jeune et ambitieux Louis de Thomassin, seigneur de Peynier. Pour satisfaire ses velléités d’ascension politique, il confie d’importants travaux aux architectes Raphaël et Laurent Jean, père et fils. Raphaël (1661-1733) compte à son actif la construction de la nef baroque et du clocher de l’église de Peynier, et l’édification de la ferme du Cabaret. Le château est considérablement agrandi. Surtout, les fenêtres de la Renaissance, démodées, sont remplacées par de grandes baies avec arc segmentaire, selon les canons du classicisme en vogue à l’époque. La façade principale est dotée d’une porte cochère pour le passage des carrosses. Dans le parc, des plates bandes à la française sont installées autour d’une allée centrale bordée de muriers. L’intérieur est décoré de cheminées en marbre rouge et de gypseries avec des moulures, des entrelacs de végétaux et des monogrammes. Le mobilier de style Louis XV (salons, tables et chaises, lits à baldaquin, commodes marquetées), est fourni par des artisans de Valensole. En 1769, le jardin est doté d’un portail monumental en fer forgé de belle facture, dont l’imposte, décorée de volutes, est munie d’un médaillon qui devait comporter le monogramme des Thomassin de Peynier. La fin des travaux vers 1743 coïncide avec l’attribution du titre de marquis à Louis de Thomassin par Louis XV. C’est une véritable consécration pour ce seigneur, également devenu président à mortier au parlement de Provence l’année précédente.

Après la Révolution

En mars 1789, le marquis est assiégé au château et contraint par les villageois de renoncer à ses droits seigneuriaux. Après cet épisode, les Thomassin paraissent avoir déserté le château, qui reste pourtant la propriété des Thomassin de Peynier et de leurs descendants (familles de Forbin d’Oppède, puis de Villeneuve de Bargemon) jusqu’en 1933, date à laquelle il est cédé à l’archevêché d’Aix-en-provence. Au XIXe siècle, il abrite une école libre tenue par les frères maristes. Plus tard, il deviendra une école d’éducatrices spécialisées, puis un établissement d’enseignement privé en 1986, jusqu’à son rachat par la municipalité dans les années 2000 qui lance un grand projet de réhabilitation pour y transférer l’Hôtel de Ville et y regrouper l’ensemble des associations communales.

Aujourd’hui

Le château est entièrement réhabilité de 2022 à 2023 par la commune de Peynier, sous la magistrature municipale de Christian Burle avec la participation du Département et de la Métropole.

16 salles ont été restaurées pour regrouper l’ensemble des associations municipales, une cour intérieure pour les activités jeunesses, un auditorium et une galerie d’exposition ont été créés, une grande salle des mariages, une salle d’honneur pour le conseil municipal et des bureaux ont également été aménagés pour accueillir l’Hôtel de Ville.

Le château fait désormais partie des grands lieux culturels et de patrimoine de Peynier.

Quelques occupants notables

Louis Isoard de Matheron (v. 1515-v. 1576)

Neveu de Guillaume de Matheron, mort sans enfant vers 1554, il lui succède comme seigneur de Peynier. Premier bâtisseur du château, il fut maître d’hôtel ordinaire du roi Charles IX, puis est devenu premier consul d’Aix en 1571.

Pierre Gassendi, philosophe et astronome

En 1621, Pierre Gassendi rend visite au seigneur de Peynier Jean-Baptiste d’Arbaud de Matheron pour une affaire judiciaire. Résidant probablement au château, c’est là qu’il observe, le 12 septembre, une aurore boréale en direction de la Sainte-Victoire. Cette observation, rendue possible à Peynier du fait d’une activité solaire exceptionnelle, a conduit le savant à utiliser pour la première fois le terme d’« aurore boréale ».

Louis de Thomassin, marquis de Peynier

Louis de Thomassin (1705-1794) est le second bâtisseur du château de Peynier. Seigneur pendant 67 ans, il est conseiller puis président au parlement d’Aix, puis devient intendant aux Antilles (1763-1783). Là, il met en oeuvre une des toutes premières expériences de libre-échange de l’histoire.

Antoine de Thomassin de Peynier

Antoine de Thomassin (1731-1809), fils du marquis Louis, est officier de la Marine royale. Capitaine puis chef d’escadre, il contribue particulièrement aux victoires remportées sur la Royal navy anglaise aux Antilles et en Inde pendant la Guerre d’indépendance. Cartographe et diplomate, il est gouverneur de Saint-Domingue et membre de l’ordre de Cincinnati.

Recherches extraites de « La Lettre de Litteralis » par Christophe Vaschalde

Peynier

GRATUIT
VOIR