Au lendemain de l’envoi par le préfet des Bouches-du-Rhône d’un courrier adressé aux présidents des six intercommunalités appelées à fusionner au sein de la métropole Aix-Marseille-Provence expliquant que la suspension par le Conseil d’État de deux arrêtés inter-préfectoraux « ne remet pas en cause la création de la métropole d’Aix-Marseille-Provence au 1er janvier 2016 », Maryse Joissains Masini oppose une interprétation contraire et conforme en tous points à la décision de la Haute juridiction administrative.

Pour le président de la Communauté du Pays d’Aix, maire d’Aix-en-Provence, cette affirmation constitue une violation caractérisée de la décision rendue par le conseil d’État qui, non seulement « a expressément écrit l’inverse et a développé les raisons dans son considérant n°11 » mais a pris aussi la peine par précaution, ce qui est inhabituel, de faire un communiqué de presse pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté dans l’interprétation qui pourrait être faite de sa décision.

Dans cette décision du 18 décembre 2015, le Conseil d’État considère en effet qu’en conséquence de la suspension des deux arrêtés inter-préfectoraux « le futur conseil de la métropole d’Aix-Marseille-Provence ne peut donc pas siéger et les groupements de communes qui existent aujourd’hui peuvent continuer à fonctionner ».

« Il me semble, poursuit-elle, que l’argumentaire du Conseil d’État, repris sommairement dans son communiqué de presse, est on ne peut plus clair dans la mesure où il considère qu’en attendant la décision du Conseil Constitutionnel, aucun organe de la Métropole ne peut se mettre en place, qu’ainsi les loi MAPTAM et NOTRe ne peuvent pas s’appliquer dans leurs termes initiaux, notamment du fait de la QPC en cours, et que dans ces conditions, les seuls organes légitimes à assurer « une continuité dans l’exécution des services publics », sont les organes des EPCI et pas ceux de la Métropole. »

Maryse Joissains Masini souligne au préfet le péril que sa position fait peser sur le paiement du salaire des agents.

Alors que ce dernier affirme que « dès le 1er janvier 2016, le comptable reconnaîtra le président de la métropole d’Aix-Marseille-Provence comme ordonnateur unique des dépenses intercommunales » et « aura donc pour responsabilité de mandater la paie des 7 500 agents de la métropole ainsi que toute autre dépense liée à l’activité de la nouvelle intercommunalité » elle observe que, selon les lois en vigueur, « ses organes délibérants et exécutifs ne seront pas en capacité de fonctionner ».

« Font par exemple défaut, outre des délibérations en matière de délégation de compétence à l’exécutif, des délibérations fixant le seuil des crédits provisoires à engager, liquider et mandater. Sans cette délibération, la paie des agents ne peut pas être mandatée, tout comme aucune autre dépense de fonctionnement ou d’investissement. C’est pour cette simple, mais évidente, raison que le Conseil d’État s’en remet aux EPCI existants », écrit-elle

« Après avoir ignoré l’ordonnance de suspension de vos arrêtés des 1er septembre et 12 octobre par le Tribunal Administratif de Marseille – en procédant à l’élection du président -, il ne faudrait pas que la décision du Conseil d’État le soit tout autant », fait-elle remarquer.

Face à la période d’insécurité juridique qui s’annonce, elle s’interroge : « les organes de la Métropole ne pourront être en mesure de fonctionner au mieux qu’en février et au plus tard en mai 2016. Pensez-vous que cette période « transitoire »  de un à cinq mois, puisse se satisfaire de simples mesures conservatoires et urgentes ? La Métropole – ne pouvant conclure de marchés, n’étant autorisée à payer ses agents et n’ayant permis à son ordonnateur d’engager des dépenses – peut–elle débuter ainsi ? »

Alors que la résistance à une mise en place autoritaire de la métropole par l’État et la ville de Marseille à l’encontre des décisions de justice dont la dernière prise par la plus haute juridiction administrative de France s’amplifie, Maryse Joissains Masini entend poursuivre le combat aux côtés des maires déjà engagés.

Elle demande à l’État de limiter son action aux possibilités qui sont les siennes dans un État de droit et donc de respecter les décisions de justice, en l’occurrence la décision suspensive du Conseil d’État en attendant la décision du Conseil constitutionnel. Conseil d’État qui, sachant l’illégalité flagrante de tout acte pris durant cette période, a explicitement prévu que les EPCI se chargent de la continuité du service public.